Séance du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis du 14 décembre 2017 : Budget primitif pour l’exercice 2018
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Monsieur le président, Mesdames et Messieurs,

Je commencerais brièvement par un constat que nous pouvons tous partager. Comme j’ai eu l’occasion de le dire pour le Groupe EELV au moment de la présentation du rapport d’orientations budgétaires, le budget du Département est soumis à une très forte contrainte du double fait de la stagnation, sinon de la baisse de ses recettes, et de la non-compensation des dépenses obligatoires, au titre du pacte national de solidarité, dépenses qui concernent notamment les allocataires du RSA et les mineurs non accompagnés.

Quelques mots sur nos recettes : certes, après une baisse continue ces dernières années ( – 80 millions d’euros depuis 2012 !), la DGF se stabilise en 2018 à hauteur du montant de 2017. Mais le fonds de soutien exceptionnel voit son montant global réduit de 50% par rapport à celui de 2017, avec des modalités d’attribution qui restent à définir. Les dotations de compensation liées à la fiscalité directe sont également réduites de 16 millions d’euros par rapport à 2017. Le risque est bien présent, celui d’une austérité imposée qui renforcerait davantage les inégalités sociales et territoriales, creusant toujours plus l’écart entre le sort réservé au peuple de la Seine-Saint-Denis d’une part, et Paris ou les autres départements de petite couronne d’autre part. Les incertitudes liées à la métropolisation, le report réitéré de la conférence territoriale d’Ile-de-France aggravent notre sentiment que les besoins spécifiques de la Seine-Saint-Denis, département jeune, populaire et métissé, ne sont pas pris en considération à la hauteur des enjeux.

Quelques mots maintenant sur nos dépenses, hors budget d’investissement : le BP 2018 stabilise à hauteur de 470 millions d’euros le montant de l’allocation RSA. C’est un devoir de solidarité nationale, et l’Etat doit en compenser le montant à l’exacte hauteur du coût réel pour notre collectivité. Quant aux mineurs non accompagnés, nous devons absolument répondre dans les meilleures conditions possibles au besoin de ces adolescents, de ces enfants, de ces jeunes qui ont quitté leur pays dans des conditions dramatiques et qui cherchent à nos côtés un refuge contre la guerre, la misère et les catastrophes climatiques. Là encore, l’Etat annonce une prise en charge des 5 premiers jours, que l’on attend toujours, et qui de toute façon sera bien insuffisante, tant les besoins dépassent largement ce laps de temps.

Or la solidarité, l’insertion, la formation, pour une politique départementale bienveillante, inclusive, sont au cœur de nos préoccupations. C’est un domaine où nous voulons être force de proposition et d’action, moteur d’innovation sociale. C’est pourquoi notre Département s’est porté volontaire pour participer à une étude sur le revenu de base, et 2 de nos Vice-Présidents, ici présents, Nadège Grosbois et Pierre Laporte, doivent participer à un prochain Groupe de travail avec les représentants des autres départements contributeurs.

Nous protestons donc vigoureusement contre la pression qu’exerce, sur la politique départementale et sur les services publics de proximité, l’effet de cisaillement produit par la baisse des subventions ou dotations d’un côté, et de l’autre côté la non compensation de dépenses sociales, qui continuent de croître. Nous constatons que ce budget refuse d’augmenter le taux de la taxe foncière sur les propriétés bâties. C’est un budget qui poursuit l’effort entamé pour limiter les dépenses de fonctionnement : une hausse 1,8% des dépenses sectorielles (incluant les rémunérations et les charges sociales), et une baisse de 2,61 % des dépenses à caractère général par rapport au BP 2017, sachant que cet effort atteint objectivement ses limites tant les services travaillent parfois avec des moyens, financiers et humains, extrêmement tendus.

La marge de manœuvre restante est étroite. La contraction de l’autofinancement (- 8 millions d’euros en épargne nette entre les BP 2017 et 2018), ajoutée à une augmentation de l’emprunt annuel de 31.4 millions d’euros, fournissent presque la totalité des 42 millions d’euros supplémentaires que ce budget primitif prévoit d’allouer à l’investissement, soit une hausse de 18% par rapport à 2017.

J’en viens au cœur de mon intervention. Ce budget, pourtant extrêmement contraint, fait le choix de tenir le cap à travers la tempête. Il poursuit résolument l’action départementale entreprise depuis le début du mandat et l’inscrit fortement dans une perspective d’ensemble à la fois écologique et sociale. Parmi les principaux axes, je citerais ici ceux qui correspondent aux valeurs que nous portons prioritairement en tant qu’écologistes : l’éducation à l’environnement dès le plus jeune âge, la réduction des pollutions, le développement des transports collectifs et du vélo, la réhabilitation et des parcs départementaux et l’augmentation de la nature en ville, la lutte contre toutes les formes de discriminations et la reconnaissance de la diversité, la mise en œuvre de la transition écologique, l’insertion par la formation, pour l’emploi et l’économie solidaire dont vous parlera ma collègue et Vice-Présidente Nadège Grosbois. Nous n’avons qu’une seule ambition : lutter contre les inégalités écologiques, sanitaires, territoriales, sociales. Nous ne poursuivons qu’un seul but : répondre aux défis du changement climatique au cœur de nos villes, et améliorer la qualité de vie des Séquano-dyonisiennes et dyonisiens.

À cette étape du mi-mandat, nous écologistes, commençons à voir les résultats concrets de notre action. Nous approuvons l’orientation pour la transition écologique que toute la majorité départementale peut s’approprier, et pour laquelle tous ensemble nous nous sommes collectivement engagés. Nous ne pouvons pas, nous ne devons ni renoncer à cet engagement ni le diminuer. C’est maintenant que les déséquilibres climatiques s’aggravent, et il en va de notre responsabilité présente que de nous doter des moyens de réduire l’impact du réchauffement climatique mondial dans les 5-10 ans à venir sur les zones d’habitat dense et/ou populaire qui constituent la majeure partie de la Seine-Saint-Denis. Je vais prendre l’exemple de 3 directions dans lesquelles nous devons résolument poursuivre notre action.

  • 1er axe : la protection des espaces naturels et de la biodiversité. La SSD bénéfice d’un réseau de parcs départementaux réunis sous l’appellation Natura C’est un formidable atout qui va permettre de renforcer la résilience du territoire. Nous en poursuivons la réhabilitation, l’aménagement, en particulier pour les rendre plus accessibles à l’ensemble des habitants et les ouvrir aux initiatives locales et citoyennes comme aux activités de pleine nature. Nos parcs ont vocation à constituer à la fois des îlots de fraîcheur pour faire face aux canicules, et des pièges à GES pour lutter contre la pollution, mais ce seront aussi des lieux de vie collective, des lieux pour créer ou renforcer des liens sociaux, intergénérationnels, conviviaux.
  • 2ème axe : la promotion des mobilités durables. Nous réalisons d’importants investissements pour générer sur le département un véritable réseau d’itinéraires cyclables reliés entre eux et changer les usages, faire en sorte que le recours au vélo soit plus fréquent, plus sûr, plus naturel. Nous voulons qu’un adolescent puisse se rendre s’il le souhaite en vélo de son domicile au collège de façon complètement sécurisée. Nous voulons rendre les gares du futur GPE accessibles aux modes actifs. Nous voulons promouvoir la pratique du vélo dans tous les quartiers d’habitat populaire en encourageant des associations locales de réparation vélo et de vélo-école. Le vélo, c’est à la fois un levier écologique et un formidable outil de désenclavement des quartiers sensibles.
  • 3 ème axe : le recyclage des déchets de construction et la rénovation du bâti ou la transformation des façons d’habiter. Aux actions du plan Renov’Habitat, nous ajoutons le nouveau dispositif du chèque Habitat écologique et citoyen (dont je dirai tout à l’heure tout le bien que j’en pense) et des mesures supplémentaires pour l’isolation phonique et bientôt acoustique des logements. Habiter de façon plus économique, plus écologique et plus agréable au quotidien, tel est l’objectif.

Ces axes demandent à être soutenus, renforcés et augmentés.

Nous savons bien que ce budget est imparfait. Nous savons quels obstacles, quelles pesanteurs peuvent parfois ralentir la mise en œuvre de certaines actions. Il y a les obstacles extérieurs : le ministère de l’Ecologie qui réduit les montants d’un appel à projet auquel nous avions souscrit, le transfert de compétences à la métropole qui risque de laisser nos ALEC démunies et de diminuer les possibilités de partenariat avec l’ADEME, par exemple. Il y a les pesanteurs internes : des décisions ponctuelles (on l’espère!) en contradiction avec l’objectif affiché de protection de l’environnement, ou l’affirmation trop timide de choix politiques qui devraient être déterminants et plus déterminés. Faire de la politique – et ce moment du budget est un moment important -, c’est renoncer à ses illusions, mais jamais à ses convictions. Nous portons une écologie que nous voulons accessible à toutes et à tous, et qui irrigue tous les grands secteurs de notre politique publique au service des habitant.e.s de la Seine-Saint-Denis. Nous sommes convaincues qu’il y a là un puissant vecteur de mobilisation et de rassemblement des forces sociales. Le Groupe EELV votera donc favorablement pour le budget primitif présenté pour l’exercice 2018.

Frédérique Denis,

Présidente du groupe EELV du Conseil départemental de la Seine-Saint-Denis